Pour la Journée des droits humains 2025: «Ne vous vengez pas vous-mêmes»
À l’occasion de la Journée des droits humains, le 10 décembre prochain, les Églises invitent à méditer sur l’article 11 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme : la présomption d’innocence, un véritable progrès civilisationnel qui protège les individus contre l’arbitraire de l’État et les préjugés de l’opinion publique. À une époque où les médias numériques encouragent les jugements hâtifs et où les réseaux sociaux font office de pilori moderne, cet article revêt une actualité nouvelle. L’impulsion pour la Journée des droits humains 2025 a été préparée par l’Église évangélique réformée de Suisse sur mandat de la CTEC.
La présomption d’innocence est mise à mal aujourd’hui parce que des instances sociétales ont commencé à porter des jugements sans procédure, sans défense, et sans les garanties de l’État de droit. SCertaines personnes sont stigmatisées avant même d’avoir été jugées. Les minorités, les personnes réfugiées ou socialement mal vues sont particulièrement vulnérables car elles ont plus de mal à se défendre, ont peu de soutien ou qui ne peuvent pas se défendre contre le fait d’être pris comme boucs émissaires.
« Ne vous vengez pas vous-mêmes …
… à moi la vengeance », dit le Seigneur (Épître aux Romains 12,19). C’est Dieu lui-même qui prononcent le jugement ultime et qui sanctionne. Les textes bibliques parlent d’un Dieu qui rend justice en ne privant pas la vengeance de légitimité. En se vengeant eux-mêmes, les humains se substituent à Dieu. Personne ne peut juger autrui si il ou elle n’a pas les mains propres – une idée exprimée très clairement dans le récit de la rencontre de Jésus avec la femme adultère : « Que celui d’entre vous qui n’a jamais péché lui jette la première pierre. » (Jean 8,7). Si la conception moderne du droit met l’accent sur le monopole de la violence légitime de l’État et considère le procès comme un moyen de garantir la vérité, l’appel biblique à la modération se fonde sur le droit exclusif de Dieu à la vengeance. Au lieu de condamner les autres, nous devrions essayer de leur pardonner, comme Dieu nous pardonne (Matthieu 6,14-15). Et oui, ce n’est pas facile !
L’Église rappelle les limites du droit de l’être humain et la promesse divine de justice pour tous ceux dont les souffrances et les douleurs sont restées impunies. Le droit ne résout pas la perte, la douleur, l’amertume et le désespoir des personnes qui ont été victimes de violence, directement ou indirectement. Mais Dieu, qui voit aussi dans les cœurs, a donné son Fils au monde afin que personne ne se perde.
Morale ǂ Droit
La présomption d’innocence nous interpelle en tant que société. Aujourd’hui, celle ou celui qui se comporte « mal » ou enfreint les normes sociales est souvent assimilé à un criminel. L’impulsion morale nous pousse à dénoncer l’injustice et elle est légitime et nécessaire. Mais la morale ne saurait se subsitituer au droit car elle opère avec d’autres catégories : l’indignation, l’empathie, la honte, l’honneur. Le droit, en revanche, repose sur des procédures institutionnalisées d’accusation, de défense et de jugement, sur des critères de preuve et sur la proportionnalité du jugement et de la sanction. La présomption d’innocence est un acte de respect : elle préserve la dignité de l’être humain, non pas parce qu’il est innocent, mais parce que sa culpabilité ne peut être présumée à la légère. Elle est la forme juridique de la grâce face à la vengeance affective et à la rétribution. Or, avec l’avènement des médias sociaux, une nouvelle forme de condamnation publique a vu le jour : le pilori numérique. Il suffit souvent d’un soupçon ou d’une citation sortie de son contexte pour nuire durablement à quelqu’un.
Impulsion 2025 pour la Journée des droits humains | Télécharger (PDF)
Comme les années précédentes, l’impulsion 2025 est complétée par des éléments liturgiques : lectures bibliques, méditation et prière d’intercession.
